Barrikadenwetter (temps des barricades) est un terme inventé par l'anarchiste Mikhaïl Bakounine dans le journal Dresdner Zeitung du 3 mai 1849 : il désigne le moment de transition dans lequel un sujet révolutionnaire émerge dans l'action collective et se réifie comme un obstacle à l'ordre. constitué. À partir d'une enquête historique menée par l'Institut Arsenale - un groupe de recherche engagé depuis des années dans des projets liés aux arts visuels et à l'analyse critique des politiques de représentation - l'exposition explore la construction, le concept et l'iconographie de la barricade par depuis la fin de la Renaissance jusqu'à nos jours, en croisant ses liens historiques avec les racines de l'avant-garde du XXe siècle.

Les murs de la salle d'exposition présentent une iconographie de la barricade qui, à travers la collection de 289 images, compare trois actes visuels différents de l'insurrection parisienne de mai 1968 : celui des manifestants, des médias et de la police. Les images de ce triptyque, bien qu’elles portent sur le même sujet, sont le résultat de politiques opposées de représentation et d’observation. Dans les images des insurgés (photographiées par des auteurs anonymes proches du mouvement situationniste) les acteurs, dont les visages ont été savamment rendus méconnaissables, sont visibles comme un collectif révolutionnaire général. Dans les photographies des journaux français de l’époque, ce sont des personnages médiatiques moralisés comme des individus qui perpétuent la violence ou qui y sont exposés. Du point de vue des autorités (ce qui ressort des photographies des archives de la Préfecture de police de Paris récemment rendues accessibles), il s'agit de personnes surveillées pour être identifiées, afin que la délinquance et les atteintes aux biens soient visuellement vérifiables.