En 1524, après les travaux de la grande entreprise décorative de San Giovanni Evangelista, Corrège est chargé par le moine bénédictin Placido del Bono de peindre deux toiles pour la chapelle familiale située dans la même église : la Lamentation sur le Christ mort et le Martyre des saints. Placido, Flavia, Eutichio, Vittorino. Dans la Lamentation, le Corrège adopte une solution iconographique totalement nouvelle : le Christ, tout juste descendu de la croix, gît à terre, la tête abandonnée sur les genoux de sa mère, le corps meurtri, les pieds et les mains encore contractés par la tension des clous. La Vierge, incapable de supporter ce contact physique atroce, s'évanouit, soutenue par Jean, tandis que Madeleine, aux pieds de Jésus, quoi qu'il arrive autour d'elle, est envahie par un sentiment de tristesse douloureuse. La tragédie est définitivement accomplie : le sacrifice du Christ nous est montré au premier plan dans toute sa souffrance atroce et humaine, suscitant chez le spectateur une forte réaction émotionnelle et un sentiment de partage, de douloureuse compassion. Le schéma de composition asymétrique et la coupe horizontale de la peinture (une solution totalement nouvelle dans la région de Parme) confèrent à la scène un pathétisme intense, qui anticipe le langage de la peinture baroque. Comme un zoom cinématographique, l'artiste concentre toute l'attention sur le groupe central, supprimant les détails qui ne sont pas fonctionnels à l'apogée dramatique de l'histoire. Le tableau, comme son homologue, est resté à son emplacement d'origine jusqu'en 1796, date à laquelle, à la suite des suppressions napoléoniennes, il a été transféré à Paris. De retour à Parme en 1816, il fut placé à son emplacement actuel dans les salles de la Rocchetta de la Galerie.