Dans ses œuvres, les forces en jeu se matérialisent et se rééquilibrent, créant un effet de dynamisme au pouvoir, comme dans Sans titre (1968), une structure dotée d'une vie propre grâce au fait qu'une tête de laitue, se consommant elle-même, détermine le déplacement du bloc de granit auquel elle est précairement fixée (comme dans un ouvrage similaire l'eau contenue dans une structure métallique tend à s'échapper, bue du coton qui y est partiellement immergé). Organique et inorganique, naturel et technologique, chaud et froid, léger et lourd sont quelques-uns des couples dialectiques sur lesquels travaille l'artiste ; la coexistence et la conciliation de matériaux et de phénomènes opposés s'étend à un niveau conceptuel, où Anselmo étudie la relation entre le fini et l'infini, le visible et l'invisible. Dès le début des années 80, l'utilisation du bleu outremer apparaît dans ses œuvres, qui définit un horizon, la frontière entre la condition terrestre et une condition ailleurs, invisible, presque spirituelle : la majeure partie de la réalité est invisible et les choses sont visibles pour nous donner la possibilité déduire l'invisible », dit l'artiste, qui obtient en 1990 le Lion d'or de la peinture à la Biennale de Venise avec ses toiles de pierre, synthèse extrême d'éléments potentiellement opposés. De ces réflexions naît également l'œuvre Invisible (2007), qui contient à nouveau une dialectique des contraires : un bloc de granit noir, parfaitement lisse et pur dans sa forme géométrique, apparaît tronqué, taillé d'un côté. La pièce manquante suppose l'absence de la particule « in », qui transforme le mot invisible (titre de l'œuvre) en visible (le graffiti écrit sur l'œuvre). La lourdeur de la matière est confrontée à l'intangibilité du mot ; l'immobilité de la pierre, sa finitude, ouvre à l'incommensurabilité de l'infini et de l'invisible qui l'entoure. D'un geste essentiel, Anselme fait allusion à la possibilité de se compléter dans ce que nous ne voyons pas, rapprochant la sphère du sensible de celle de l'intellect, la matière de l'imaginaire, le microcosme humain du macrocosme universel.